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BALAOO

— Ah ! mince alors ! Où qu’c’est qu’t’as déniché ça ? interrogea Hubert.

— C’est moi qui la lui ai offerte, dit Balaoo. Quand je l’ai vue passer ce matin dans ses loques, j’ai eu pitié d’elle. Je ne veux pas qu’elle aille toute nue sur les routes. C’est indécent. J’avais justement une robe à la maison, je lui ai jeté ça sur les épaules du haut du grand hêtre de Pierrefeu, ça lui va comme un gant !… Tourôô ! Tourôô !…

— C’est une robe, dit avec intention Siméon (une intention si grossièrement soulignée qu’elle fût comprise de tout le monde)… C’est une robe qu’elle a bien raison de soigner. Elle ne pourrait pas en avoir de plus belle le jour de ses noces !

Aussitôt Zoé cessa de parader dans ses atours et devint rouge comme un bouquet de cerises. Balaoo gronda :

— J’aime pas qu’on parle mariage devant moi !

Alors, il y eut un froid. Hubert crut devoir dire, la voix douce :

— Il n’y a rien qui puisse te mettre de mauvaise humeur, Balaoo, dans ce qu’on vient de dire. Il faudra bien que Zoé se marie un jour.

— C’est son affaire ! jeta Balaoo dont le front se gonfla et dont les joues soufflèrent.

— Et toi aussi, Balaoo ! Il le faudra bien un jour !…

— Moi, bondit l’anthropopithèque ! Moi ! Me marier ! avec une femme d’homme ! Ah ! jamais ! jamais !… jamais !… Phoh ! Phoh ! Goek ! Goek ! tch ! tch ! phoh ! phoh ! phoh ! phoh !… Une femme d’homme !…

Il se frappa sur le cœur qui rendit un son de grosse caisse et s’éloigna de ses amis hommes.

— T’as donc laissé ton amoureuse dans ton pays, Balaoo ?