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CHAPITRE VIII

l’attaque


Tout à coup, un bond le jeta, assis devant le docteur qui faisait semblant de dormir et qui était si bien adossé à son arbre qu’il paraissait ne plus vouloir faire qu’un avec le tronc. Balaoo, un coude à la cuisse gauche et la joue dans la main droite d’en haut, dans la position d’un de la Race qui pense, contemplait le prisonnier. À quoi pense Balaoo ? Pourquoi ces soupirs ? Ce tremblement ? Ce remuement des lèvres ?… Quelle est la phrase d’homme qui glisse de cette bouche animale ?… « Assez de crimes comme cela ! » Balaoo, malin, imagine que, s’il sauvait un de la Race, Madeleine lui pardonnerait peut-être d’avoir traîné par les pattes de derrière le noble étranger en visite jusqu’à l’arbre où il l’a pendu ? Et, ma foi, voilà Balaoo qui défait le nœud de braconnier et qui, oubliant tout à fait sa tenue d’anthropopithèque, tape sur l’épaule du docteur Honorat.

— Hop ! lui dit-il poliment.

Se lever ! Le quadrumane lui ordonne de se lever ! Le quadrumane le délivre ! Dans son cerveau stupide et apte aux déductions hâtives et sentimentales, le docteur, à cause de ce geste généreux, met déjà les bêtes bien au-dessus des hommes. Se lever, il ne demande que ça. Hélas ! il ne peut se lever, parce que ce singe, avec sa façon