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Page:Leroux - Balaoo, 1912.djvu/249

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BALAOO

qu’elle vit bien qu’elle ne pourrait jamais atteindre la porte des Roubion chez lesquels généralement se centralisaient toutes les nouvelles du pays.

Cependant, elle parvint, par les cuisines, dans la grande salle d’été transformée en infirmerie, dans le moment même que Bois-sans-Soif, sergent à la Deux du Trois, racontait les terribles et rapides et incompréhensibles événements auxquels personnellement il avait assisté. Il avait la veine, lui, de s’en tirer avec une oreille fendue.

Et maintenant que c’était passé, pour sûr, il ne regrettait rien.

Bois-sans-Soif s’exprimait autant avec les gestes qu’avec la parole, et souvent on comprenait mieux les uns que les autres.

On voyait très bien, comme si on y avait été, la petite troupe qu’il commandait, se glisser dans les hautes fougères, sans bruit, dans les ténèbres et le silence de la forêt…, et cela rien qu’à la façon dont il se courbait, assouplissait le corps, allongeait les bras, remuait les doigts tâtonnants et prudents.

Et puis, toute la mystérieuse bataille s’évoquait avec son torse redressé, ses poings fendant l’air, frappant on ne sait quelle forme fuyante et inconnue. Et puis, c’étaient les fusillades, pan ! pan ! pan ! pan !… la joue penchée sur son bras comme s’il visait… Ah ! on y était !… On y était !… Mais on n’en savait pas plus long pour ça, car enfin, qu’est-ce qu’on savait ?… Rien !… Mais rien de rien !… On savait qu’il y avait des morts, voilà tout, et des blessés !… Mais comment tout ça était-il arrivé ?… Ah ! voilà le hic ! Voilà le hic !…

Le colonel seul peut-être aurait pu le dire. Mais il ne pouvait plus parler ! et pour l’écrire, il faudrait attendre