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BALAOO

Balaoo et Gabriel (comme ne cessent de le conseiller les sergents de ville) « circulaient » depuis longtemps.

Assis sur l’impériale du tramway Montrouge-Gare de l’Est, le panier entre eux deux, ils appréciaient la douceur du temps, la fraîcheur des feuilles toutes neuves aux arbres du boulevard, le charme de cette soirée de printemps et l’excellence des cacaouettes.

Balaoo attendait, pour « faire des représentations » à Gabriel que le panier fût vide, ce qui advint à la hauteur de la prison Saint-Lazare.

Comme Gabriel proposait alors de descendre du tramway pour se mettre le long des terrasses de cafés, à la recherche d’autres marchands de cacaouettes, Balaoo crut le moment venu de lui exposer les dangers de sa conduite.

Balaoo avait pris sa voix sévère pour lui dire que, s’il continuait à voler des cacaouettes, il irait en prison. Et il lui expliqua, en lui montrant les murs d’en face, ce que c’était qu’une prison d’hommes.

Gabriel ne put s’empêcher de frissonner devant l’horrible bâtisse. Il songeait à sa grande cage si gaie du Jardin des Plantes parmi les arbres et les fleurs, où il recevait la visite quotidienne des nourrices de petits d’hommes et des guerriers aux jambes écarlates.

Il promit à Balaoo tout ce que celui-ci voulut, pourvu qu’il le conduisît chez Maxim. Balaoo lui en avait parlé comme le meilleur café de Paris pour les bananes et les ananas ; seulement, il fallait savoir s’y tenir tranquille parce que c’était très bien fréquenté.

— Je veux bien te conduire chez Maxim, répondit Balaoo, mais tu comprends que, si tu te jettes sur les bananes et sur les ananas comme tu t’es jeté sur les cacaouettes, ça finira par faire du vilain. Il faut attendre