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BALAOO

leurs courses insensées, vendirent des numéros jusqu’à cinq sous pièce. Inespérés et les mères de familles voulaient, avant tous les autres, être renseignés, et ne regardaient pas, ce jour-là, à la dépense. À la terrasse des cafés on s’arrêtait de boire, sur les trottoirs on s’arrêtait de marcher. Et on lisait. Tout le monde lisait ou écoutait lire ; c’était, du reste, très simple. Depuis le matin, quatre jeunes filles avaient disparu, emportées par le monstre ; une, au coin de la rue de Médicis et de la rue de Vaugirard : une autre, en plein boulevard Saint-Germain ; une troisième, près du square Louvois ; une quatrième avait été cueillie sur l’impériale d’un tramway qui passait sur le quai du Louvre, toujours dans des endroits où il y avait des arbres. Le monstre se cachait dans les arbres et, soudain, allongeait la main, tirant avec une force invincible les cheveux de la jeune fille. La jeune fille, poussant des hurlements, suivait, et si rapidement que personne n’avait le temps de la retenir. Une jeune personne, qui sortait de l’hôpital et qui se reposait sur un banc du square Montholon, n’avait dû son salut qu’à ce qu’au cours de sa maladie, on lui avait rasé la tête. Le chignon seul était resté entre les mains du monstre.

Quant au monstre, il était doué d’une vélocité infernale et on le cherchait encore dans les arbres qu’il apparaissait de l’autre côté de la rue ou du boulevard sur un toit pour disparaître, presque aussitôt, avec sa proie.

La préfecture de police était sur les dents.

On exigeait du Conseil municipal des mesures exceptionnelles. Des imbéciles, comme il y en a toujours dans les moments les plus difficiles où personne n’a envie de rire, des imbéciles prétendirent qu’il n’y avait qu’un moyen de se débarrasser du clown mystérieux qui marche