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BALAOO

Ayez donc confiance en moi, monsieur Saint-Aubin. Parlez !

Patrice fit aussi exactement que possible et fort minutieusement le récit des événements de la nuit, tels que nous les connaissons. Il avait besoin de s’éclairer lui-même. Au fur et à mesure, du reste, qu’il parlait, l’hypothèse du juge d’instruction lui apparaissait plus plausible et il en frissonnait.

Quand il eut fini, il considéra avec une grande anxiété M. de Meyrentin. Celui-ci caressait ses favoris poivre et sel d’une main énervée et ses petits yeux brillèrent de colère sous le binocle d’or :

— C’est tout ? fit-il d’un ton sec.

— Je vous ai dit tout ce que j’ai vu et entendu, soupira Patrice.

— Et vous n’en avez pas vu davantage ? Et vous n’avez pas eu, je ne dis pas le courage, mais la curiosité de vous traîner jusqu’à la porte du passe-plats pour savoir ce qui se passait dans le plafond !

— Monsieur, j’étais anéanti, et du moment que je n’avais plus de courage, j’avais encore moins de curiosité.

Mais M. de Meyrentin avait toutes les peines du monde à retenir l’expression de son désappointement :

— Et vous avez laissé ainsi mourir ce pauvre homme !

— Mais, monsieur le Juge !…

À votre place ! continua le juge, féroce… oui, à votre place ! car l’autre croyait vous avoir pendu, monsieur, tout simplement !… Attendez !… Ne vous évanouissez pas… Tout espoir n’est pas perdu… Répondez à mes questions. Il avait été entendu publiquement que vous deviez coucher sur le billard ?

— Oui, monsieur…