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L’HOMME QUI REVIENT DE LOIN

— Elle n’est point malade ? demanda Fanny.

— On peut dire qu’elle est fatiguée, et cependant, elle ne remue guère ! » fit la servante, après les avoir débarrassés de leurs caoutchoucs et en les introduisant dans un salon qui sentait le renfermé.

Ils s’assirent. Il y avait là du velours d’Utrecht comme il devait y avoir du reps dans les chambres. Devant chaque fauteuil, un petit coussin rouge en forme de galette attendait les pieds des dames en visite. Sur la cheminée, sous trois globes, une pendule de marbre noir et deux chandeliers d’argent. Sur la pendule, un motif en bronze représentant un guerrier romain. De petits ronds de dentelles sur les meubles. Dans une vitrine, une grande quantité d’objets d’ivoire et d’écaille et un œuf d’autruche.

« Ce qu’on doit s’amuser ici ! fit Jacques entre ses dents.

— Surtout, répliqua Fanny, quand on a rêvé de devenir châtelaine de la Roseraie !…

— C’est vrai, murmura Jacques… Il n’en faut pas davantage pour troubler la plus solide cervelle… »

Ils se turent, car ils entendaient le frôlement d’une robe dans le corridor et la porte s’ouvrit.

C’était Marthe. Elle était de plus en plus spectrale avec son peignoir blanc qui flottait autour de ses membres grêles, et sa figure de cire et ses grands yeux noirs qui brillaient d’un feu de plus en plus inquiétant. Vivement, elle leur tendit ses deux mains :