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Page:Leroux - L’Homme qui revient de loin.djvu/142

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L’HOMME QUI REVIENT DE LOIN

Quatre heures et demie…

Soudain, la petite porte s’entr’ouvre tout doucement, et une forme blanche apparaît sur le seuil.

C’est Marthe.

Elle est telle qu’ils l’ont vue l’après-midi, même, dans sa robe blanche, avec son châle sur ses épaules frissonnantes.

Elle fait deux pas comme en un rêve. Sa démarche est lente, on dirait une somnambule.

Elle étend les bras. Elle regarde autour d’elle, elle s’arrête devant l’ombre difforme et fantastique des saules et elle appelle d’une voix basse et passionnée : « André !… André !… »

« Tu vois bien qu’elle rêve… » dit Jacques.

Fanny lui serre la main à la briser…

« Tais-toi donc !… Tu n’entends pas un bruit de chaînes ?…

— Si, si, mais c’est la chaîne du bachot…

— Attends donc !…

— Mais Marthe va tomber à l’eau !…

— Eh ! Après ? » répliqua la voix sèche de Fanny…

Mais Marthe ne tomba pas à l’eau ; elle marchait le long de la rive et se pencha sur le fleuve et tendit les bras dans un équilibre inquiétant en répétant de sa tendre voix suppliante : « André !… André !… »

Mais elle ne tomba pas…

Un instant, elle resta tout à fait immobile, comme en extase, sembla parler à quelqu’un, lui adressa des signes… puis tout doucement,