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UN DÉPART PRÉCIPITÉ
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s’était présenté à l’heure dite, Jacques et Fanny l’attendaient. Ils ne s’étaient point couchés. Il leur parut qu’André avait recouvré un peu ses esprits. Il n’avait plus cette pâleur qui les avait effrayés. Il était moins agité, il paraissait déjà avoir pris son parti du mystérieux événement qui le chassait de la Roseraie. Il s’était montré presque tendre avec Fanny, lui recommandant, une dernière fois, les enfants, lui faisant promettre qu’elle se considérerait comme leur maman, pendant tout le temps de la séparation dont il ne pouvait prévoir le terme. Il l’avait engagée à s’installer au château dès le lendemain et à s’y considérer absolument comme chez elle.

Au moment de partir, il avait accepté la proposition de Jacques qui lui offrait de l’accompagner au moins jusqu’à Paris.

« Tu as raison ! Viens !… Nous avons encore à parler de l’usine… et puis j’ai quelques dernières recommandations à te faire. Pour être plus tranquilles, laissons le chauffeur. »

Et ils étaient partis tous deux dans l’auto. Fanny la voyait encore s’éloigner dans la nuit, avec son feu arrière et la grosse masse sombre de la bâche, jetée sur la malle d’André pour la préserver de la pluie fine qui tombait… Ensuite la jeune femme s’était allongée sur un canapé et avait essayé de fermer les yeux ; mais elle était trop énervée pour goûter quelque repos. Une étrange agitation la secouait, la jetait tout à coup sur ses pieds, la faisant courir près de son fils qui dormait d’un sommeil paisible.