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Page:Leroux - L’Homme qui revient de loin.djvu/62

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L’HOMME QUI REVIENT DE LOIN

grands yeux qui semblaient toujours voir des choses extraordinaires.

Elle grelottait. On n’eût pu dire si c’était de peur ou de froid. Elle bougea à peine quand Fanny fut près d’elle.

Mme de la Bossière lui prit les mains. Elles étaient brûlantes.

« Mais vous avez la fièvre, ma pauvre enfant… qu’est-il encore arrivé ?… Et d’où venez-vous ? Comment êtes-vous dans cet état ? »

Elle était littéralement couverte de boue et sa robe était déchirée. Elle avait la tête nue, les cheveux épars. Elle avait l’air d’une folle qui serait parvenue à s’enfuir de son cabanon et qui aurait longtemps couru à travers champs. Et il y avait un peu de cela dans son cas.

Elle fit comprendre par petites phrases hachées qu’elle s’était sauvée de chez elle, par-dessus le mur du jardin, et qu’elle avait couru, couru, couru… jusqu’à la Roseraie…

« Mais pourquoi ? mais pourquoi ?…

— Pourquoi ?… » Et elle parut retrouver du coup toutes ses forces. Elle se souleva brusquement comme si elle avait reçu une décharge électrique… « Parce que… parce que je l’ai revu !…

— Vous avez revu qui ?… demanda Fanny qui devinait bien cependant, après la séance de la veille, de qui il s’agissait…

— J’ai revu André !… je vous dis que je l’ai revu… répéta Marthe avec une énergie incroyable… Ah ! cette fois, ne me dites pas