— Vous avez raison, docteur, acquiesça Jacques. Vous êtes trop gros pour un médecin spiritualiste…
— Mon ami, je l’avoue… j’attache trop de prix à certaines satisfactions charnelles. Tenez, encore, tout à l’heure, votre cuisinière, sur mon indication, du reste, m’a fait monter dans ma chambre, pour mon premier déjeuner, deux œufs sur le plat à la crème… c’était un rêve !… »
Jacques s’arrêta une seconde à contempler cette excellente face réjouie, aux lèvres sensuelles, puis allant quérir la sincérité du regard sous les bésicles d’or :
« Entre nous, docteur, lui dit-il, avouez donc qu’un bon vivant comme vous ne doit pas croire un mot de tout ce qu’il nous a raconté l’autre soir… »
Mais le « papa Moutier », comme on l’appelait dans les salles de rédaction des revues scientifiques où il s’était fait une réputation assez originale en étendant hardiment le domaine du magnétisme animal de Charcot et en osant associer le spiritualisme le plus transcendantal et même le plus orthodoxe au spiritisme expérimental de Crookes, le papa Moutier sursauta :
« Ah ! ne dites pas ça ! ne dites pas ça !… Vous pourriez me causer le plus grand tort !… Certains me croient malade et vous voyez si j’en ai l’air !… Il ne manquerait plus que l’on me prît pour un farceur !… et surtout à la veille de faire paraître un périodique qui va révolutionner tous les cercles s’occupant plus