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Page:Leroux - L’Homme qui revient de loin.djvu/90

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L’HOMME QUI REVIENT DE LOIN

du pays. Le Saint-Firmin avait les lettres, il fallait céder. André, pour sauver la vie de Marthe, promit immédiatement tout ce qu’il voulut. C’est alors que le notaire reparut aussitôt derrière le mari offensé et que le Saint-Firmin, après avoir entraîné André dans son cabinet, rédigea avec lui toutes les paperasses nécessaires à la gestion de ses biens et de l’usine pendant son absence. Voilà l’histoire vraie. Le reste n’est qu’invention, je le veux bien, du cerveau en travail de la pauvre Marthe. Il paraît, du reste, qu’elle souffre le martyre !… Il ne se passe point de journée où son mari ne lui ricane sous le nez cette phrase qui l’épouvante : Il ne reviendra plus ! plus ! plus ! plus ! Il ne reviendra plus, parce qu’il l’a assassiné, pense-t-elle… mais vous, petit tchéri, vous ne le pensez pas, n’est-ce pas ? Vous pensez qu’il est toujours vivant, votre cher frère ?

— Oui, Fanny, je le pense, ou du moins, je l’espère. »

Et il se leva, le front sombre.

« Comment ! vous me quittez sans m’embrasser ? »

Il l’embrassa : alors, elle le retint de ses deux petites mains jetées à ses fortes épaules et, le regardant bien dans les yeux :

« Jack, pouvez-vous dire à votre chère petite femme pourquoi vous avez cassé ce verre, hier, quand cette folle est venue nous raconter qu’André avait été assassiné en automobile ?

— Parce que, répondit Jacques de sa voix la plus calme, j’ai été extraordinairement ému