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LA DOUBLE VIE DE THÉOPHRASTE LONGUET

fique, une grande parole que j’admire, mais à laquelle je ne crois pas, mon cher monsieur d’Éliphas de Brandebourg de Feu-Saint-Elme de la Boxe !

Cependant que Marceline et Adolphe étaient atterrés de cette extraordinaire façon qu’avait Théophraste de comprendre les noms d’Éliphas, celui-ci dit, en lui serrant encore la main avec une inconcevable amitié :

— Et cependant, il va falloir chasser Cartouche, car si nous ne parvenions pas à le chasser, il nous faudrait le tuer, et je ne vous cacherai pas, mon cher monsieur Théophraste Longuet, que c’est une opération délicate !

« Quand l’Homme de Lumière, dit Théophraste dans ses mémoires, entreprit de chasser de mon être l’obsession de Cartouche, qui ne s’y trouvait point, hélas ! en imagination, mais bien en réalité, je ne pus que sourire de pitié et me gausser d’un si formidable orgueil ; mais quand je sus qu’il voulait le chasser par le seul miracle de la raison, je pensai qu’il était temps de servir cet homme tout chaud à Charenton.

» Or, il faut que l’on sache cela, parce que vraiment cela en vaut la peine, il n’avait pas prononcé trois phrases que déjà j’étais avec lui, que je le comprenais, que je jugeais nécessaire de servir le dessein qu’il avait de chasser Cartouche de moi par le seul miracle de la raison. Enfin, dans la suite de son discours, il se rendit si bien maître de ma pensée que je ne pouvais comprendre comment j’avais pu rester de si longues années sans même soupçonner la vérité évidente qu’il m’enseignait. Il me serait absolument impossible de répéter ici les mots magnifiques qui rendaient la vérité plus éblouissante encore, mais comme ses arguments sont les plus simples qui puissent se présenter à l’esprit des hommes, je ne désespère pas de produire chez ceux qui me liront, en les leur apportant tout sèchement, une