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JE TE DOIS MON DOIGT !

impression efficace. Je pus ainsi mesurer tout d’abord l’abîme qui séparait l’Homme de Lumière de mon ami Adolphe, et qui séparera toujours l’Homme de Raison du Singe Savant.

» Avant tout, il me dit qu’il croyait que j’avais été Cartouche. Il en était sûr. Et il m’affirma que c’était une chose toute naturelle. Il me confia qu’il avait « grondé » sévèrement M. Lecamus de m’avoir présenté mon cas comme possible mais exceptionnel, attendu que mon cas est celui de tout le monde. Certes ! tout le monde n’a pas été Cartouche, mais tout le monde a été, avant d’être, quelques-uns parmi lesquels il a pu se trouver des hommes qui valaient bien Cartouche.

» Vous entendez l’Homme de Lumière ? Mon cas était ordinaire. Tout le monde, tout le monde, tout le monde a vécu avant de vivre et revivra. « C’est, me dit-il, la Loi du Karma. Mon esprit pouvait être en paix. » Il m’expliqua en quelques mots inouïs de clarté la Loi du Karma, et vraiment, quand je l’eus comprise — ce qui est aussi facile que d’additionner de tête deux chiffres — je me demandai comment j’avais pu être assez niais pour m’imaginer qu’on pouvait commencer à naître ou finir de naître. On naît tout le temps, on ne meurt jamais ! Et quand on meurt, c’est qu’on renaît, et ainsi de suite depuis le commencement du commencement des commencements !

» Le véritable but, m’a-t-il dit, de cette effrayante évolution des âmes à travers les corps, est de les développer pour les rendre aptes à goûter le bonheur absolu qui sera finalement la part de tous les heureux qui entreront dans le Royaume des Cieux, qu’il appelle Nirvana.

» Ne trouvez-vous point la sagesse de cette religion admirable, et n’en aimez-vous pas la clarté qui touche