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LA DOUBLE VIE DE THÉOPHRASTE LONGUET

baret Au Pistolet, tenu par Germain Savard et sa femme, à la Courtille, près la haute Borne (rue des Trois-Bornes). Savard fumait sa pipe sur le pas de sa porte. Duchâtelet demanda :

— Y a-t-il quelqu’un là-haut ?

— Non.

Duchâtelet dit alors :

Ces quatre dames y sont-elles ?

Savard, qui attendait cette phrase, dit :

— Montez !

Quand il eut dit : « Montez ! », Savard se rangea de côté et la petite troupe se précipita. Elle se ruait à l’assaut de Cartouche comme une armée se rue à l’assaut d’une place forte.

« Quand nous arrivâmes dans la chambre haute, dit M. Jean de Coustade dans son rapport, nous trouvâmes Balagny et Limousin buvant du vin devant la cheminée. Gaillard était dans les draps et Cartouche assis sur le lit, raccommodant sa culotte. Nous nous jetâmes sur lui. Le coup était pour lui si inattendu qu’il n’eut point le temps de nous faire résistance. On l’attacha avec de fortes cordes et nous le menâmes d’abord chez M. le secrétaire d’État de la guerre et ensuite à pied au Grand-Châtelet, dès que l’ordre nous en eut été donné. »

Au fait, les choses ne se passèrent point tout à fait aussi simplement que M. de Coustade le raconte, mais aboutirent au même résultat. Cartouche était d’une force exceptionnelle, malgré sa petite taille, et on ne vainquit sa résistance qu’en l’attachant à un pilier, ce qui nécessita une bataille ardente. Enfin, quand toutes les précautions furent prises, on fit avancer un carrosse dans lequel on déposa Cartouche. Celui-ci était en chemise (il n’avait pas eu le temps de remettre le pantalon qu’il raccommodait). Comme on le bousculait fort, il dit :