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Page:Leroux - La Double Vie de Théophraste Longuet.djvu/248

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LA DOUBLE VIE DE THÉOPHRASTE LONGUET

assez stupides de l’appeler le nouveau Cartouche), a fait des siennes rue Guénégaud. Il y a là une sorte de voûte-passage que traverse une planche. On a trouvé sous cette planche, il y a quelques jours, le corps d’un jeune polytechnicien (il s’agit ici de la mort de M. de Bardinoldi, dont le mystère a si fort intrigué la presse). Ce que la police n’a confié à personne, c’est que sur la tunique de ce polytechnicien était épinglée une petite carte où l’on avait écrit au crayon : « Nous nous reverrons dans l’autre monde, monsieur de Traneuse. » Ceci est encore à n’en point douter, un crime du nouveau Cartouche, car l’ancien (il faut être bête, s’écria Théophraste, comme un journaliste, pour s’imaginer qu’il y a deux Cartouche), car l’ancien a, en effet, à cette place, assassiné un officier ingénieur nommé M. de Traneuse. Cartouche l’avait assommé d’un coup de canne derrière la tête, et le polytechnicien a eu le crâne fracassé, par derrière, avec un objet contondant. »

Théophraste se livra à quelques commentaires.

— Ils disent aujourd’hui : objet contondant. Objet contondant ! cela sonne bien ! Objet contondant me plaît… Vous faites une drôle de tête, dit-il à Marceline et à Adolphe, et vous voilà serrés l’un contre l’autre comme si vous redoutiez une même catastrophe ! Vous avez bien tort de vous faire de la bile pour quelques méchantes plaisanteries. Je profite de l’occasion, mon cher Adolphe, pour t’expliquer la joie que j’ai à fréquenter la rue Guénégaud. Cette histoire de M. de Traneuse fut pour moi l’origine d’une des plus jolies farces que je jouai aux mouches de M. d’Argenson. À la suite de cette exécution de M. de Traneuse, qui s’était permis sur mon compte des propos fort déplacés, je fus poursuivi par deux patrouilles du guet qui m’enveloppèrent et rendirent toute résistance impossible. Mais