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OÙ L’ON POURRAIT CROIRE…

la muraille, pétrissent cet endroit de la muraille. Qu’est-ce que veulent mes doigts ? Quelle est la pensée de mes doigts ? J’avais un canif, voyez-vous, dans ma poche. Et tout à coup j’ai laissé choir de dessous mon bras mon ombrelle verte pour prendre dans ma poche mon petit couteau. Et, entre deux pierres, sûrement, j’ai gratté. J’ai fait tomber avec mon couteau, entre deux pierres, de la poussière et de la poudre de ciment. Puis mon couteau a piqué quelque chose entre les deux pierres et a ramené cette chose.

» Voici pourquoi je suis sûr de n’être point fou. Cette chose est sous mes yeux. Dans mes heures les plus paisibles, moi, Théophraste Longuet, je la puis contempler, sur mon bureau, entre mes derniers modèles de timbres en caoutchouc. Ce n’est pas moi qui suis fou, c’est cette chose qui est folle. C’est un morceau de papier déchiré, maculé… un document dont on pourrait dire l’âge et qui a tout ce qu’il faut pour plonger dans une consternation prodigieuse un honnête marchand de timbres en caoutchouc. Le papier est, vous pensez bien, terriblement moisi. L’humidité a mangé la moitié des mots, qui semblent, à cause de leur teinte rousse, avoir été écrits avec du sang.

» Mais dans ces mots que voici, dans ce document qui avait certainement quelques siècles d’existence, et que je faisais passer dans le rayon carré du soupirail, et que je considérais, le poil hérissé d’horreur, JE RECONNAISSAIS MON ÉCRITURE ! »

Voici, traduit au clair, ce précieux et combien mystérieux document :