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LA DOUBLE VIE DE THÉOPHRASTE LONGUET

Théophraste ouvrit son portefeuille et tendit en tremblant son document :

— Pourrais tu me dire l’âge exact de ce papier ?

Ambroise mit des lunettes et approcha le papier du jour de la vitre.

— Il y a là, dit-il, une date : 172… Le dernier chiffre manque, ce serait donc un papier du dix-huitième siècle… À neuf ans près, notre tâche devient très facile.

— Oh ! fit Théophraste, j’ai bien vu la date, mais est-ce que vraiment le papier est du dix-huitième siècle, est-ce que la date n’est pas menteuse ? Voilà ce que je voudrais savoir.

Ambroise montra le centre du papier :

— Vois !

Théophraste ne voyait rien. Alors, Ambroise alluma une petite lampe et éclaira le document. En mettant le document entre l’œil et la lampe, on distinguait dans l’épaisseur du papier une sorte de couronne.

— Théophraste, fit Ambroise avec émotion, ce papier est excessivement rare. Cette marque est presque inconnue, car il a été très peu tiré de cette marque dite « à la couronne d’épines ». Ce papier, mon cher Théophraste, est exactement de l’année 1721.

— Tu es sûr ?

— Oui. Mais dis-moi, s’écria tout à coup Ambroise, qui ne put dissimuler sa surprise, comment se fait-il que ce document, qui date de 1721, soit, dans toutes ses parties visibles, de ton écriture ?

Théophraste se leva, remit son document dans son portefeuille et sortit, en titubant, sans répondre.

Je reprends, parmi tout un fatras de papiers, ce coin des mémoires de Théophraste :

« Ainsi maintenant, écrit Théophraste, j’avais la preuve, je ne pouvais plus douter, je n’en avais plus le