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Page:Leroux - La Double Vie de Théophraste Longuet.djvu/87

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LE PORTRAIT

monsieur de Traneuse, officier ingénieur qui le dégoûtait fort. Mais, comme ce rendez-vous était après déjeuner, il se promettait d’aller prendre l’air au Moulin des Chopinettes.

Marceline, sous sa chemisette de nuit, tremblait à faire pitié. Elle regrettait l’absence d’Adolphe. Elle eut la force de dire, à tout hasard :

— Il fait bien mauvais pour aller prendre l’air au Moulin des Chopinettes.

— Bah ! répondit Théophraste fort logiquement, je laisserai ici mon ombrelle verte et je prendrai ma plume noire.

Là-dessus, il s’en fut, en mettant la dernière main à sa cravate.

Sur le palier, il rencontra M. Petito, le professeur d’italien, qui descendait l’escalier, lui aussi. M. Petito salua très bas M. Longuet, se plaignit de l’état de la température et lui fit mille compliments de sa bonne mine. Théophraste répondit sur un ton peu aimable, et comme M. Petito, sur le trottoir, semblait ne devoir point quitter Théophraste, celui-ci lui demanda si Mme Petito ne se résoudrait pas bientôt à apprendre sur le piano un autre air que le Carnaval de Venise ; mais M. Petito répondit en souriant qu’elle étudiait justement Une étoile d’amour, et qu’elle étudierait à l’avenir tous les morceaux qui pourraient convenir à M. Théophraste Longuet.

Et M. Petito demanda :

— De quel côté allez-vous, monsieur Longuet ?

— J’allais faire un tour au Moulin des Chopinettes, mais décidément le temps est trop gâté et je descends aux Porcherons.

— Aux Porcherons ?… (M. Petito allait demander : « Qu’est-ce que c’est que les Porcherons ? » Mais il se ravisa.) Moi aussi, fit-il.