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Page:Leroux - La Machine à assassiner.djvu/58

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GASTON LEROUX

— Messieurs ! gémit d’une voix expirante le pauvre M. Lavieuville, qui avait reconnu M. Norbert et le jeune et déjà célèbre prosecteur, messieurs, vous m’avouerez que tout ce qui m’arrive depuis ce matin est inimaginable !…

— Inimaginable !… Monsieur Lavieuville, vous désireriez peut-être prendre quelque chose ?… un peu de thé bien chaud ?

— Non ! je désire avant tout rentrer chez moi et prévenir la police !

— Monsieur Lavieuville, prononça l’horloger d’une voix un peu sèche (et que le marguillier trouva même menaçante), avant d’introduire la police dans une pareille histoire, qui est avant tout une histoire de famille, comme nous allons vous le prouver en nous excusant d’une erreur dont vous avez été victime, vous voudrez peut-être bien nous dire comment il se fait que vous portez un vêtement qui ne vous appartient pas et qui nous a trompés sur votre honorable personnalité ?…

— Oh mon Dieu ! monsieur Norbert, je n’y vois aucun inconvénient… Ce vêtement, je ne l’ai pas volé, veuillez bien le croire… mais on m’a pris le mien et l’on m’a donné celui-ci !… C’est aussi simple que cela !… Et quant aux conditions dans lesquelles a eu lieu de fâcheux troc, je ne vous les cacherai pas davantage, et peut-être alors pourrez-vous me donner la clef de cette énigme, car, pour moi, j’avoue que je comprends de moins en moins ce qui m’arrive.

— Monsieur Lavieuville, nous vous renouvelons nos excuses, fit alors entendre Jacques… Ne nous cachez rien… Il y va peut-être de la vie d’une personne…

— J’ai bien cru qu’il y allait de la mienne ! fit M. Lavieuville en secouant douloureusement sa tête grisonnante… Enfin, si j’en suis quitte pour ces quinze mille francs… je m’en consolerai… bien qu’ils ne soient pas à moi !… peut-être même dois-je me féliciter de votre