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Page:Leroux - La Poupée sanglante, 1924.djvu/162

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LA POUPÉE SANGLANTE

marais avec une figure épouvantable, tantôt se jetant dans son hamac avec des grognements de bête enragée, mordant les cordes… C’est pas un chrétien, ça !… J’avais envie de l’abattre d’un coup de fusil…

— Père Violette, pas de bêtises !… interrompit la mère Muche. Qu’est-ce que c’est que cette petite qui vient d’arriver ?…

— Une enfant !… Ça n’a pas plus de dix-sept ans !… Ah ! mais celle-là, faut pas qu’il y touche ! ou je fais le gendarme !… Riez pas, mère Muche ; cette fois, à la première alerte, je le dénonce !… Il faudra bien qu’il s’explique…

— D’où qu’elle vient, la petite ?…

— Elle doit être Berrichonne… c’est une fille de la campagne… elle l’appelle : mon oncle !…

— Ce serait-il que ce serait vraiment son oncle ?

— Paraîtrait !… Du reste, il n’a pas fait de frais pour celle-là… il ne s’est pas déguisé en gentleman… Il a plutôt l’air de la traiter comme une petite servante… Il lui fait faire ses courses… Ça n’est plus le boulanger qui apporte les provisions… Personne ne vient plus au chalet… Il a même remercié le souillon qui venait deux heures tous les matins faire le ménage… Ils vivent tout seuls, tous les deux, loin de tout, sûrs de n’y être dérangés par personne… La petite n’est ni belle ni laide… elle s’appelle Anie.

— Tu lui as parlé ?

— Oui… tantôt… je lui ai demandé si elle se plairait dans nos marais… Elle m’a répondu :

» — Pourquoi donc que je ne m’y plairais pas ? mon oncle est si bon !… Textuel…

» — Tant mieux s’il est si bon pour toi, que je lui ai répliqué… il ne l’a pas été pour toutes celles