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Page:Leroux - La Poupée sanglante, 1924.djvu/88

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LA POUPÉE SANGLANTE

le marquis a donné quelques fêtes dans son hôtel et puis tout ce mouvement qui ressuscitait le quai de Béthune a cessé assez brusquement. On plaint Georges-Marie-Vincent.

Néanmoins, ses amis se félicitent qu’il ait « pris le dessus » sur ses malheurs domestiques.

Je tiens naturellement tous ces détails de Christine. Elle est très renseignée.

— Le sang des Coulteray est plus fort que tout ! me dit-elle. Ils en ont vu bien d’autres !… Un petit bourgeois serait écrasé par cette infortune. Lui, il prend des maîtresses. Il aurait voulu me mettre dans sa collection… ça n’a pas réussi. Il est déjà consolé, ou du moins je l’espère. Je ne suis, je ne puis être que son amie et l’amie de la marquise : ils ont besoin de moi entre eux deux. Vous avez le secret de ma situation ici.

Sur ces entrefaites, le marquis est entré, un flacon et des gobelets d’argent à la main. Ses yeux brillaient.

— Il faut que je vous fasse goûter, dit-il, ce que Saïb Khan vient de trouver pour la marquise. Elle y a goûté. Elle a déclaré cela excellent ! Je vous crois, on dirait du cocktail !… Et savez-vous ce que c’est ? Un mélange de sang de cheval, d’hémoglobine, de je ne sais quoi !… Goûtez-moi cela, je vous dis !… aucune fadeur… au contraire… une saveur capiteuse… et chaud à l’estomac comme un vieil armagnac !… Ça réveillerait un mort !… Et ça vous donne un appétit !

Nous bûmes. C’était, en effet, tout ce que disait le marquis :

— Avec cela, ma petite Christine, nous la remettrons debout en quinze jours !…

Il se tourna vers moi ;

— Vous étiez là quand on est venu la chercher pour le docteur ?… Christine vous a raconté ?…