Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 1.djvu/25

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


III

NUIT D’ORIENT


Devant le café de Sofia qui fermait, car il allait être dix heures et l’on était en état de siège, Marko le Valaque, correspondant particulier de la Nouvelle Presse de Paris, voulut arrêter Rouletabille, lui demander les nouvelles, mais celui-ci avait hâte de rentrer chez lui pour expédier une dernière dépêche et se recueillir ensuite, penser aux effroyables histoires d’Ivana. La pauvre enfant ! la pauvre enfant ! Maintenant, il la plaignait, revoyait la cicatrice. Amour !… Amour !… Chez lui, dans son appartement de l’annexe de l’hôtel du Danube, dans le salon transformé en un véritable bureau d’état-major avec toutes ces cartes étalées sur les murs, sur les tables et piquées de petites épingles à tête de couleur, représentant celle-ci la première armée, celle-là la seconde, celle-là la troisième et toutes les épingles noires, là-bas, autour d’Andrinople, figurant les Turcs… Rouletabille, les mains derrière le dos, se promène, comme Napoléon avant une campagne.

Mais, au fond, il ne pense qu’à l’amour et à certaine cicatrice sous une épaule ambrée entrevue dans l’échancrure d’un corsage dont le délicat parfum l’enivre encore…