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NUIT D’ORIENT

Rouletabille n’avait pas fini de dicter sa dépêche que le domestique rentrait :

« Eh bien, Modeste ?

— Voilà la dépêche visée, monsieur.

— Hein ? fit Rouletabille, vainqueur ; elle ne les gêne pas, celle-là ! »

Et il l’arracha, puis donna le second télégramme à Modeste avec les mêmes recommandations pour le ministre.

« Vous ne pensez pas, exprima Vladimir Pétrovitch en se polissant les ongles, que si votre télégramme fait allusion seulement à une parcelle de la vérité, cet excellent M. Franghia va vous le viser ?

— J’espère bien qu’il ne me le visera pas ! répondit le reporter. Le télégramme ne partira donc pas, mais nous nous partirons… comprends-tu, Vladimir Pétrovitch… de Kiew ! et à coup sûr, cette fois, et dans un pays où nous ne risquons pas de rencontrer des confrères ! »

Enchanté de lui-même, il se replongea dans l’étude de ses cartes…

« Qui est-ce qui vous a donné des tuyaux ? demanda Vladimir.

— Personne ! s’exclama Rouletabille ; moi, je laisse les tuyaux aux confrères et je fais du reportage avec des idées générales ! Voyez-vous, mes enfants, les idées générales, il n’y a encore que ça pour être renseigné !

— En attendant, en voilà un « de général », s’écria La Candeur. En effet, le général Poutilof faisait son entrée, poussant Modeste devant lui et suivi de quatre soldats baïonnette au canon.

— Messieurs, annonça-t-il, vous êtes aux arrêts, par ordre supérieur…

— Vous ne pouvez pas sortir d’ici. L’ordre vise ce garçon, monsieur et monsieur. (Il désignait Modeste, La Candeur et Vladimir). Quant à vous, monsieur (il montrait Rouletabille), veuillez me suivre chez le général-major. »