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VIII

LE DONJON ASSIÉGÉ


Allongé dans une des meurtrières du troisième étage, Rouletabille écoutait les bruits du dehors. Dans la nuit très noire on distinguait vaguement une rumeur d’hommes et c’était tout. Tous les feux avaient été éteints dans la bâille, dans les cours et dans le chemin de ronde, moins par ordre peut-être que par la pluie qui s’était remise à tomber avec rage. Les soldats de Gaulow avaient dû reculer jusque sous les hangars, sous les galeries et les cloîtres pour se mettre à l’abri. Certes ! ils n’étaient point bien loin. On les entendait grouiller dans les ténèbres, parfois s’appeler avec des cris, des malédictions.

Cependant, de toute la nuit, ils ne tentèrent rien.

Il devait y avoir dans la Karakoulé un désordre immense. La disparition de Kara Selim après la fuite d’Ivana, et la blessure de Stefo le Dalmate laissaient le château-fort sans chef, dans le moment qu’il en avait le plus besoin. Les kachefs avaient dû se réunir quelque part autour des lieutenants alourdis par une journée de festins, et tout ce monde devait être fort embarrassé de prendre un parti.