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Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 2.djvu/172

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LE CHÂTEAU NOIR

— Gaulow est donc encore vivant ?…

— Oui, fit-elle avec un effrayant sourire, et c’est moi qui le soigne.

— Ah ! Ivana, je croyais bien qu’il était mort ! lui dit-il en la prenant à part.

— Et pourquoi croyiez-vous cela, mon ami ?

— Ivana… ce sang… ce sang dont vos mains étaient couvertes… ce sang qui remplissait vos ongles ! D’où venait donc ce sang-là ?…

— Je vous le dirai peut-être un jour, petit Zo !…

— Ah ! vous l’avez torturé, sans le tuer ?…

— Gaulow est en très bonne santé… Il ne faut pas oublier que nous pouvons en avoir besoin à la dernière minute et que sa vie nous répondra peut-être de la nôtre !

— Bien ! bien ! Ivana, vous voilà redevenue tout à fait raisonnable ! Je vous aime ainsi !… dit-il.

— Je regrette beaucoup que vous ne m’aimiez pas autrement… ajouta-t-elle et elle s’enfuit.

— Qu’est-ce qu’elle a encore ?… Qu’est-ce qu’elle a encore ?… » se demandait le reporter en la voyant disparaître par le trou de l’échauguette…

L’aurore du 20 octobre se leva et les jeunes gens eurent la joie de constater que l’incendie n’avait pas seulement détruit le « chat », mais encore le petit pont de fortune que les assiégeants avaient jeté sur le fossé.

Cependant, cette journée, qui avait si bien commencé pour eux, se termina d’une façon bien lugubre.

Ils pensaient que si Athanase avait réussi, comme on était maintenant en droit de l’espérer, ils ne devaient point tarder à voir poindre, sinon une armée, tout au moins une colonne de secours. Aussi ne cessèrent-ils, tout ce jour-là, d’interroger l’horizon.

La garnison de la Karakoulé, après l’insuccès de la nuit précédente, les laissait tranquilles et comme il était suffisamment démontré qu’on ne pouvait atteindre l’assiégé sur la plate-forme du donjon, les soldats qui se trouvaient sur la tour de veille avaient cessé de tirer.