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Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 2.djvu/173

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LES DERNIÈRES CARTOUCHES

Rouletabille et ses compagnons étaient donc sur cette plate-forme comme chez eux. C’est de là qu’ils cherchaïent à apercevoir, au loin, dans la campagne, la troupe qui devait les délivrer.

La jumelle de Rouletabille passait de main en main et quand un groupe un peu nombreux se montrait dans les défilés, du côté du Nord, l’espoir faisait battre tous les cœurs. Mais ce groupe n’était suivi d’aucun autre et quand on pouvait en distinguer le détail, on s’apercevait que c’étaient des paysans avec une charrette, ou des bergers avec leurs troupeaux.

Avec leur jumelle, ils n’interrogeaient pas seulement les chemins du Nord, si tant est que l’on puisse appeler « chemins » des pistes que les récentes pluies avaient rendues encore plus impraficables.

Le secours pouvait venir aussi du Nord-Ouest et même de l’Ouest, en admettant que les armées eussent commencé à franchir la frontière la veille, du côté de Devetli Agatch.

D’après les calculs de Rouletabille et ce qu’il savait de la mobilisation bulgare, c’était par là que se glisseraient les brigades de la quatrième division. Or, vers le soir, comme Vladimir, fatigué de regarder au Nord s’était retourné vers l’Ouest, son attention fut attirée par un point noir qui descendait entre des cimes et qui semblait se mouvoir avec assez de difficulté. Il pria Rouletabille de lui passer sa jumelle.

Vladimir resta alors quelques instants sans rien dire et sans bouger ; mais sa physionomie, pendant qu’il fixait le point en question, dans la lorgnette, semblait rayonner, ce dont ses camarades s’aperçurent.

« Enfin, nous diras-tu ce que c’est ? » interrogea La Candeur.

Vladimir ne répondit point encore tout de suite, mais il affichait un air de plus en plus satisfait…

« Tu nous fais mourir ! gémit La Candeur.

— C’est pour mieux te faire revivre !… répliqua l’autre.