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Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 2.djvu/83

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LE TIROIR SECRET

Là-dessus, il quitta la chambre sans même se retourner, persuadé qu’elle allait lui tendre un piège, mais se promettant de surveiller, du dehors, ce qui se passerait, lui parti, dans la chambre nuptiale. Il connaissait un coin, pour cela, il avait fait aménager du temps de l’ancienne première kadine, pour écouter les propos qu’elle pouvait tenir quand il n’était pas là, et aussi dans le moment qu’il en était le plus jaloux, pour voir ce qu’elle pouvait faire. De ce coin-là, auquel on arrivait par une petite terrasse, donnant sur les jardins, on entendait et l’on voyait très bien…

Ivana se traîna jusqu’à la porte qu’il avait refermée sur lui ; elle entendit son pas qui s’éloignait et aussi les ordres qu’il donnait aux eunuques de service. Aussitôt elle courut au coffret, en souleva le couvercle, et… Rouletabille en sortit le revolver à la main.

Rouletabitle, déguisé en houri, Rouletabille secouant les voiles blancs et le yalmack d’une kadine qu’il avait chipés, Allah savait où.

« Ouf ! fit-il, je commençais à m’ankyloser dans cette boîte ! »

Elle lui faisait signe de se taire, tremblante de bonheur, mais épouvantée de son adresse et de son audace.

« Pourquoi l’as-tu retenu ? fit le reporter qui tutoyait pour la première fois Ivana, mais qui n’avait pas le temps de s’attarder à des formules de politesse. Aussitôt que tu as su que j’étais dans la boîte, 11 fallait l’amener près de moi ; je lui aurais réglé son compte et nous en serions débarrassés !… »

Il disait cela en enlevant méthodiquement le déguisement qui l’embarrassait. Ivana le regardait faire sans une pensée, admirant son sang-froid, incapable de l’aider.

« Je n’ai pas voulu, dit-elle, non ! Je n’ai pas voulu te l’amener. Il est plus fort que toi, et il eût appelé ses esclaves ! Il a toujours son sifflet pendu à son collier ! Ah ! petit Zo ! petit Zo, vivant !…