Page:Leroux - Le Fauteuil hanté, Lafitte, 1900.djvu/287

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dans lequel il nous apparaissait contribuaient même à le rendre funèbre. Il ne se préoccupait point de nous, ignorant certainement notre présence. Il était resté debout, appuyé sur son fusil, à l’entrée de la grotte, dans le rayon vert. Nous le voyions de profil : un nez fort, aquilin, un nez d’oiseau de proie, une maigre moustache, une bouche amère, un regard éteint. Il était nu-tête ; son crâne était pauvre de cheveux ; quelques mèches grises tombaient derrière l’oreille. On n’aurait pu dire exactement l’âge de cet homme ; il pouvait avoir entre quarante et soixante ans. Il avait dû être remarquablement beau, au temps où il y avait encore de la lumière dans cet œil glacé, au temps où ces lèvres de marbre souriaient encore : d’une beauté dominatrice et funeste. Je ne sais quelle sorte d’énergie terrible se cachait encore sous les lignes effacées de cette manière de spectre ; l’impression devait nous en être donnée par le profil aigu et l’arcade sourcilière profonde ; et surtout par ce front découvert, aux rides ardentes, accusatrices de passions farouches. L’homme était habillé d’un vieux complet de velours marron fort usé. Il avait de grandes bottes qui lui montaient à mi-cuisse. Mon regard, en descendant le long de ces bottes, rencontra quel-