Page:Leroux - Le Parfum de la dame en noir.djvu/180

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douce, plus accueillante, plus aimante, ni surtout plus digne d’être aimée. L’air serein, la rive nonchalante, la mer pâmée, les montagnes violettes, tout ce tableau auquel mes sens d’homme du Nord étaient peu accoutumés évoquait des idées de caresses. C’est alors que je vis un homme qui frappait la mer. Oh ! il la frappait à tour de bras ! J’en aurais pleuré, si j’avais été poète. Le misérable paraissait agité d’une rage affreuse. Je ne pouvais me rendre compte de ce qui avait excité sa fureur contre cette onde tranquille ; mais celle-ci devait évidemment lui avoir donné quelque motif sérieux de mécontentement, car il ne cessait ses coups, il s’était armé d’un énorme gourdin et debout dans sa petite embarcation qu’un enfant craintif poussait de la rame en tremblant, il administrait à la mer, un instant éclaboussée, une « dégelée de marrons » qui provoquait la muette indignation de quelques étrangers arrêtés au rivage. Mais, comme il arrive toujours en pareil cas où l’on redoute de se mêler de ce qui ne vous regarde pas, ceux-ci laissaient faire sans protester. Qu’est-ce qui pouvait ainsi exciter cet homme sauvage ? Peut-être bien le calme même de la mer qui, après avoir été un moment troublée par l’insulte de ce fou, reprenait son visage immobile.

Je fus alors interpellé par la voix amie de