Page:Leroux - Le Parfum de la dame en noir.djvu/214

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

pour deux sous. Chose bizarre, cette extrême avarice ne répugnait point à Mrs Edith, qui lui trouvait une certaine originalité. Enfin nul n’était jamais entré chez lui. Jamais il n’avait invité les Rance à venir admirer ses jardins.

— Il est beau ? demandai-je à Mrs Edith quand celle-ci eut fini son panégyrique.

— Trop beau ! me répliqua-t-elle. Vous verrez !…

Je ne saurais dire pourquoi cette réponse me fut particulièrement désagréable. Je ne fis qu’y penser après le départ de Mrs Edith et jusqu’à la fin de mon service de garde qui se termina à onze heures et demie.

Le premier coup de cloche du déjeuner venait de sonner ; je courus me laver les mains et faire un bout de toilette et je montai les degrés de la Louve rapidement, croyant que le déjeuner serait servi dans cette tour ; mais je m’arrêtai dans le vestibule, tout étonné d’entendre de la musique. Qui donc, dans les circonstances actuelles, osait, au fort d’Hercule, jouer du piano ? Eh ! mais, on chantait ; oui, une voix douce, douce et mâle à la fois, en sourdine, chantait. C’était un chant étrange, une mélopée tantôt plaintive, tantôt menaçante. Je la sais maintenant par cœur ; je l’ai tant entendue depuis ! Ah ! vous la connaissez bien peut-être