Page:Leroux - Le Parfum de la dame en noir.djvu/67

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long de la route qu’ils suivaient et qui était trop surveillée. Notre petit Rouletabille, lui, dormit comme tout le monde, la nuit, et marcha au grand jour sans se cacher de personne. Seulement, après avoir fait sécher ses vêtements ― on commençait à entrer heureusement dans la bonne saison et il n’eut point à souffrir du froid ― il les mit en pièces. Il en fit des loques dont il se couvrit et, ostensiblement, il mendia, sale et déguenillé ; il tendait la main, affirmant aux passants que, s’il ne rapportait point des sous, ses parents le battraient. Et on le prenait pour quelque enfant de bohémiens dont il se trouvait toujours quelque voiture dans les environs. Bientôt ce fut l’époque des fraises des bois. Il en cueillit et en vendit dans les petits paniers de feuillages. Et il m’avoua que, s’il n’avait pas été travaillé par l’affreuse pensée que la Dame en noir pouvait croire qu’il était un voleur, il aurait conservé de cette période de sa vie le plus heureux souvenir. Son astuce et son naturel courage le servirent pendant toute cette expédition qui dura des mois. Où allait-il ? À Marseille ! C’était son idée.

Il avait vu, dans un livre de géographie, des vues du Midi, et jamais il n’avait regardé ces gravures sans pousser un soupir en songeant qu’il ne connaîtrait peut-être jamais ce pays enchanté. À force de vivre comme un