Aller au contenu

Page:Leroux - Le Roi Mystère.djvu/126

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

on est de Paris, mon cher comte, il faut connaître Régine ! J’aurai l’occasion de vous le présenter.

— Ce monsieur qui paraît si triste, et qui promène ces deux petites filles ?

— C’est cela ! C’est l’heure de sortie de ses filles, et quand Régine n’est pas retenu dans les bureaux de la guerre, il ne laisse à personne le soin de les promener.

— Mais ces bébés ont deux ans ! Et ce sont ses filles ?… Mais le père a l’air d’un vieillard !

— C’en est un ! Et c’est ce qui explique sa folle passion pour ces deux rejetons tardifs, deux jumelles délicieuses.

— Je croyais que vous m’aviez dit que ce Régine n’avait eu dans sa vie qu’une passion…

— Le jeu !… Mais depuis deux ans, il en a une autre… ces deux petites filles qui lui sont nées au bout de huit ans de mariage…

Mme Régine est donc très jeune ?

— Sinon très jeune, beaucoup plus jeune que son mari… c’est une cousine, une proche parente de M. Sinnamari, notre procureur impérial.

— Ah, oui ! J’avais oublié, répondit négligemment Teramo-Girgenti. Vous m’avez déjà raconté tout cela… Mais j’ai une si pauvre mémoire… Régine et votre M. Sinnamari sont de vieux amis, n’est-ce pas ?

— Des copains de collège !… Ils étaient trois à Sainte-Barbe, qui ne se quittaient jamais : Sinnamari, Régine et Eustache Grimm… Ils ne se sont pas lâchés dans la vie…

— Sénèque, M. Philibert Wat, a fait un traité sur l’Amitié, et ça ne lui a pas réussi…

Et Teramo-Girgenti changea de conversation.

Il demanda à Wat des détails sur les cours de déclamation de Mlle Marcelle Férand.

À quoi Wat répliqua en entretenant le comte de la présence de l’actrice à la cérémonie de la place de la Roquette, mais il était à remarquer que, plus Wat s’efforçait d’amener la conversation sur le seul terrain qui l’intéressait, plus le comte réussissait à la transporter ailleurs.

Wat en fut donc pour ses frais.

Le comte expliqua qu’il ne montrait quelque curiosité de ce cours que parce qu’on le lui avait désigné comme pouvant lui fournir les éléments d’une troupe jeune et jolie — et de talent — destinée à jouer couramment les chefs-d’œuvre qu’il aimait, dans une salle de théâtre qu’il faisait aménager pour cet objet dans son propre hôtel.

Comme on arrivait au coin de la rue d’Amsterdam et de la rue Saint-Lazare, après quelques arrêts causés encore par l’encombrement