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Page:Leroux - Le Roi Mystère.djvu/135

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— Oh ! oui, monsieur, fit-elle, c’est bien merveilleux. Vous ne savez pas à qui est cette maison ? Oui, vous le savez, puisque vous m’y avez conduite… Je voudrais l’acheter.

— Elle est à moi, répondit le comte, et je vous la donne.

— Oh ! monsieur, vous êtes bon… Mais qui êtes-vous ?… Qui êtes-vous, pour m’avoir conduite ici ?…

Le comte dit d’une voix altérée :

— Je ne sais pas qui je suis…

— Comment cela ?…

— Savez-vous qui vous êtes, vous ?… demanda le comte tristement. Savez-vous comment vous avez quitté cette maison, ce bonheur, vos parents que vous n’avez jamais revus ?…

— Non ! fit-elle. Je ne sais pas… Je croyais être seule sur la terre à avoir oublié qui je suis…

— Vous ne vous souvenez de rien ?… Ni quand vous êtes partie, ni pourquoi… ni comment, ni rien ?…

— Non ! non !… Rien… Encore maintenant, rien… Je crois que mon père est mort et que ma mère est morte… mais je n’en suis pas sûre… Et puis, j’ai eu la fièvre typhoïde, et il paraît que la fièvre typhoïde est terrible quelquefois pour la mémoire… Mais pourquoi pleurez-vous, monsieur ?… Ah ! pourquoi pleurez-vous ?… Comment se fait-il que mes malheurs vous touchent à ce point que vous ne puissiez retenir vos larmes ? Si vous êtes un parent, dites-le moi !… malgré la honte qui puisse en rejaillir sur vous d’avoir une parente comme moi. Le secret sera bien gardé, allez !… Si vous savez quelque chose, renseignez-moi… Il ne fallait pas me conduire ici si vous ne vouliez rien me dire… Pourquoi pleurez-vous ?

— Je ne suis pour vous qu’un ami… déclara Teramo-Girgenti… un ami inconnu… Il faut avoir confiance en moi… il faut me dire le nom de votre père…

— Mais je ne le sais pas !… Mais je vous jure que je ne le sais pas !… Je sais qu’une vieille femme de Marseille m’a trouvée dans la rue, et je ne sais pas comment je me trouvais à Marseille… Je sais que j’ai eu une fièvre typhoïde dont j’ai failli mourir… c’est tout ce que je sais…

— Vous me le jurez ?

— Je le jure !

Le comte en silence, la conduisit vers cet endroit, sous les tilleuls, où elle s’était souvenue d’une petite maison en bois qu’avait construite le père. Alors, il lui montra la petite maison en bois, qu’elle n’avait pas vue tout d’abord, à cause d’un rideau de lierre qui la masquait.

C’était une pauvre petite cabane dans laquelle on ne pouvait entrer qu’en se courbant.

— Oh ! fit-elle, notre cabane… Entrons !

— Comment ! Notre cabane ?… demanda le comte.