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Page:Leroux - Le Roi Mystère.djvu/234

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Mais la voix du préfet de police se faisait entendre :

— C’est impossible ! Impossible que ce soit le même homme… Et si nous nous trompons, les conséquences peuvent être incalculables.

— Je suis bien de votre avis, reprenait Sinnamari, voilà pourquoi je tiens à tenter ce coup-là… Nous verrons bien ce qu’il fera ! Et ce qu’il fera nous renseignera !… Nous saurons du coup à quoi nous en tenir !…

Ici les voix se firent tellement basses que Macallan n’entendit plus rien. On ne saurait exprimer la fureur qui envahit le petit corps de l’avorton quand il entendit Sinnamari émettre cette hypothèse : « Si Teramo et le roi ne font qu’un… »

Puis, la voix du chef de la Sûreté se fit entendre, mécontente :

— Jamais ! C’est une invention de Dixmer !… Je m’en fiche pas mal de ces gens-là et ils peuvent jaboter tout leur soûl… Comprenez donc que Dixmer encore une fois ménage la chèvre et le chou… Vous avez eu beau lui promettre ma place…

— Vous êtes ridicule, mon cher, répliquait Sinnamari.

Et puis encore du silence.

Sinnamari se faisait à nouveau entendre :

— Je suis si bien de votre avis sur Dixmer que, me méfiant de son jeu, je ne dirai rien à son agent qui doit venir nous chercher ici… Sans quoi, j’aurais attendu l’arrivée de cet agent pour vous faire prévenir… Ah ! c’est un coup !… Quand j’ai su que le hasard me mettait au théâtre en face de Teramo et me l’amenait jusque dans ma baignoire, je me suis dit : Il ne faut plus le lâcher, il faut l’emmener coûte que coûte avec nous et tenter le coup !

En entendant ces derniers mots, M. Macallan se releva, tremblant, le front en sueur.

— N. d. D. !… s’écria-t-il, lui qui ne jurait jamais que par le dieu des Grecs. Quel coup vont-ils donc tenter ?

Et il sortit du cabinet, dans un tel état de fureur, d’humeur et de terreur qu’il en oublia son bâton…

— Oh ! si je pouvais savoir où il est !…

À tout hasard, il ouvrit deux portes de cabinets particuliers, mais ne réussit qu’à troubler des desserts plus ou moins intéressants. Un garçon le bouscula, lui demanda ce qu’il voulait. Il fit la description de Liliane, et on le conduisit dans le cabinet de Sinna.

— Pourvu, se disait-il, que le procureur ne vienne pas tout de suite !

Quand la porte du cabinet de Sinnamari fut poussée, il aperçut Liliane qui écoutait tranquillement Teramo-Girgenti. Le comte semblait fort galant et allumait une cigarette d’Orient aux lèvres de la jeune femme ; mais, quand il aperçut M. Macallan, il bondit littéralement sur lui et le prit au collet.

L’autre balbutiait :