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Page:Leroux - Le Roi Mystère.djvu/237

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TROISIÈME PARTIE

« TU TE RÉVEILLERAS
D’ENTRE LES MORTS »

I

UNE FÊTE CHEZ LE COMTE DE TERAMO-GIRGENTI

Ce soir-là, l’avenue des Champs-Élysées, aux alentours du rond-point, était si bien ombrée d’équipages qui se rendaient à l’hôtel du comte de Teramo-Girgenti, que la circulation en fut arrêtée. Les voitures qui descendaient de l’Arc de Triomphe durent, pour gagner la place de la Concorde, prendre des chemins détournés. On n’avait encore vu à la fois si somptueuse et si nombreuse cohue qu’aux grands soirs des Tuileries, et le service d’ordre était débordé de toutes parts. Une foule énorme de curieux, d’oisifs, de badauds, augmentaient encore la confusion.

Quelques échos, parus dans les feuilles boulevardières, avaient suffi à rameuter, devant l’hôtel du Comte, les Parisiens qui aiment tant à badauder. Mais en vérité, bien peu avait été publié.

À ce moment, Paris était surtout intrigué depuis quelques semaines par les histoires que l’on racontait sur un certain R. C., sur une certaine association que les initiés appelaient l’A. C. S. et que commandait un bandit fameux et qu’on avait cru jusqu’alors légendaire : le roi des Catacombes, dont les initiales seules épouvantaient la police.

L’imagination aidant, on avait eu vite fait de créer, pour ce Cartouche nouveau style, un piédestal gigantesque d’où il dominait la ville et l’État. Tout ce que l’on rapportait de lui était fabuleux. On le disait riche à millions et disposant de tous les secrets de l’Empire. Ses hommes étaient partout. Il avait des espions dans tous les ministères. Les fonctionnaires les plus huppés étaient à ses ordres. Enfin, le plus beau était que ce bandit paraissait animé de l’esprit le plus honnête et qu’il avait juré le bien de tous. On citait des exemples de bons citoyens