sang, la bouche hurlante, poursuivi par une nuée de domestiques, de laquais en livrée qui s’accrochaient comme ils pouvaient à ce forcené.
— Teramo-Girgenti !… Le comte de Teramo-Girgenti ! hurlait la bouche.
Le comte, qui semblait avoir peine à se soutenir, trouva la force cependant de s’avancer vers l’homme :
— Me voici ! dit-il… C’est moi !
Alors, l’homme s’écroula aux pieds de Teramo en s’écriant :
— Ils me l’ont volée !… Ils me l’ont volée !…
On n’était pas encore remis d’un pareil événement que, par une porte faisant face à celle qui avait livré passage au Professeur, un autre individu accourait, tout aussi déguenillé tout aussi arraché, « abîmé » que le Professeur, et qui ne paraissait pas moins ému. Aussitôt qu’il l’aperçut, le comte marqua une stupéfaction profonde et lui fit signe de venir à lui.
— Qu’y a-t-il donc, Cassecou ? demanda Teramo qui, voyant le destin se détourner de lui, essayait de retrouver un peu de sa force d’âme pour résister aux coups inattendus qui le frappaient.
Le nouveau venu se pencha à l’oreille du comte :
— Il y a, maître, que la Profonde est en pleine révolte et que le Vautour est sur le point de se faire proclamer roi !…
— Le Vautour ? interrompit le comte en montrant du doigt à Cassecou le bourreau rouge, l’homme au masque et au glaive. Mais il est ici !
— Non maître ! Je viens de le voir à l’instant, entouré des mutins !…
Teramo releva le Professeur, qui se désolait à haute voix, maudissait dans les larmes le sort ennemi, invectivant les dieux infernaux. Et, l’entraînant d’une main, pendant que de l’autre il conduisait Cassecou, il se dirigea vers l’homme rouge, ouvrit la porte contre laquelle il s’appuyait, poussa cet homme dans l’autre pièce déserte, referma la porte sur eux quatre, arracha le masque qui couvrait le visage du porte-glaive, et s’écria :
— Ce n’est pas le Vautour !
Non, ce n’était pas le Vautour ! C’était un homme dont l’allure, la haute taille, le profil masqué lui ressemblaient, mais ce n’était pas le Vautour !
L’homme, du reste, ne paraissait rien comprendre au geste brusque du comte qui l’avait démasqué, et son ahurissement de brute prouvait assez qu’il n’était, dans toute cette affaire, qu’un vulgaire comparse qui ignorait même l’importance du rôle muet qu’on lui avait fait jouer.
Le comte ne s’attarda pas à lui demander des explications. Il se recueillit quelques secondes, les mains sur les yeux, dans une immobilité tragique. Lorsqu’il montra à nouveau ses regards, il était redevenu