Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/269

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l’ignorance des aventures survenues à « l’arzent de la patrie ».

Toutefois ce grand politique (nous parlons du prince) devait se douter de quelque chose, ou, s’il ne doutait de rien, trouvait bon de prendre certaines précautions au regard du comte. Ainsi faisait-il entrevoir à Odon Odonovitch les pires supplices si ce dévoué serviteur n’exécutait point à la lettre ses instructions. Ces menaces épouvantèrent sans doute notre intendant car il résolut sans plus tarder de regagner avec l’argent du chèque tout celui qu’il avait perdu.

Le résultat de l’opération ne se fit pas attendre. Quand Titin revint à l’hôtel vers les cinq heures du soir, une automobile vide arrivait de Monte-Carlo. Le chauffeur présenta un pli fermé au Bastardon qui décacheta et lut :

« Monseigneur ! ze ne mérite point la pitié de monseigneur, mais si monseigneur désire encore voir son serviteur, qu’il monte vite dans cette auto que ze lui envoie ! Dans une heure je serai mort. Z’ai reçou la lettre « Z’ai encore manzé l’arzent de la patrie ! »

Titin se jeta dans l’auto :

« S’il n’est pas mort, je le tue ! » pensa-t-il.

Quarante minutes plus tard, l’auto s’arrêtait devant le casino. Titin aperçut le comte qui prenait un bock à la terrasse du café de Paris.

Il se précipita vers lui, courroucé. L’autre s’était levé, très digne :

— Monseigneur, ne me touçer pas ! J’ai eu tort de dire à monseigneur que ma vie loui appartient ! Ma vie ne m’appartient pas plus qu’elle n’appartient à monseigneur !… Elle est