Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/419

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moi, mais à cause de vous ! Il vous aime cet homme ! Or, il y a déjà bien assez de choses qui vous séparent ! Il ne voudrait pas encore mettre entre vous deux le cadavre d’un mari !… Cela : vous ne le lui pardonneriez pas !

Cette fois, elle regarda Hippothadée avec étonnement.

Ses yeux avaient une lueur singulière qu’elle ne leur avait jamais vue. Il s’apercevait de l’effet produit et en jouissait d’une façon aiguë et presque cynique.

— Non ! Titin ne peut rien contre moi ! fit-il dans un sourire et en osant prononcer ce nom pour la première fois depuis bien des jours. Au fond, nous n’avons pas de meilleur ami que Titin !… Il a été un peu brutal avec ce pauvre Supia ! Mais quand nous aurons fini de le pleurer, ce cher homme, nous nous apercevrons que Titin nous a rendu un inappréciable service ! Supia était devenu impossible, non seulement pour moi qui en étais réduit, pour payer le terme, notre terme, ma chère Antoinette, à emprunter de l’argent à cette excellente comtesse d’Azila, mais encore pour vous dont il avait accaparé toute la fortune ! Non seulement vous allez pouvoir rentrer dans vos biens, mais nous devenons ses seuls héritiers.

Toinetta se dressa, frissonnant, ne comprenant pas très bien, toute étourdie de ce que lui disait cet homme, et aussi de la joie presque satanique qui émanait de la moindre de ses paroles et de son singulier sourire.

— Ses seuls héritiers ? répéta-t-elle machinalement et non sans un certain effroi.