Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/421

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Vous oubliez, répliqua le prince, avec un petit rire sec, vous oubliez, chère Antoinette, que cette chère Cioasa a disparu !

— Elle a disparu, mais elle n’est peut-être pas morte !

— Pourquoi voulez-vous qu’elle ne soit pas morte ? Tous les autres sont morts… Croyez-vous qu’elle n’aurait pas donné signe de vie en apprenant tout ce qui s’est passé depuis son départ de la Fourca ? Allez ! allez ! Hardigras ne l’aura pas épargnée plus que les autres. Il lui est certainement arrivé au moins quelque terrible accident, à la pauvre vieille ! Il nous faut être renseigné là-dessus le plus tôt possible. J’ai mis sur cette affaire MM. Souques et Ordinal en leur promettant une forte prime. Vous voyez que, s’il faut en croire le mot que je vous ai fait lire, ils savent employer leur temps.

— Monsieur, vous pensez à tout ! fit-elle dans un souffle.

— À tout, Antoinette, dès qu’il s’agit de votre bonheur.

Il salua très bas et sortit…

Elle resta éperdue dans sa chambre. C’est lui l’assassin ! C’est lui !… Elle répétait : C’est lui ! comme une folle, en proie à une joie épouvantable !…

« Lui ! Lui » ! Elle avait vu se lever tous les cadavres derrière chacune de ses paroles… Et le dernier de tous, Supia aussi, c’était lui qui l’avait fait mourir !… Lui qui avait tout fait ou qui avait fait faire !…

Ah ! maintenant, elle se rappelait le regard mortel qu’il avait jeté en dessous à Supia certain jour où il était passé à la caisse de la