Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/70

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qu’« elles l’attendaient dans la salle à manger ».

— Elles vous tiennent toujours rigueur, fit Supia en riant. Allons faire notre paix avec elles, mon cher Hippothadée !

Et il le fit passer devant lui.

Ces dames, en effet, étaient là. Elles feignirent la plus grande surprise en apercevant le prince, bien que la domestique les eût averties qu’il se trouvait au salon avec M. Supia.

Mme Supia était encore une fort belle femme, quoiqu’un peu empâtée. Son cou grassouillet s’ornait d’un collier de perles magnifiques, son poignet dodu secouait de lourds anneaux d’or, d’autres bijoux solides étaient épars sur sa personne soigneusement parée de soie et de velours.

La bonne santé de Thélise ressortait davantage quand elle avait comme repoussoir le profil de tôle de son bilieux époux. Toute autre que cette brave dame fût morte de désespoir au lendemain de ses noces en découvrant combien elle s’était trompée sur le compte de son nouveau conjoint et en supputant les tristes heures qu’il lui faudrait passer. Mais Thélise était de la bonne race de ce pays enchanté où il n’y a point de place pour la douleur.

Patiente, elle s’était dit qu’elle était jeune encore et qu’une troisième expérience pouvait être plus heureuse que les précédentes. C’est cet espoir qui la soutint dans son malheur. Les années s’étaient écoulées. Y avait-il eu une troisième expérience ? Y en avait-il eu plusieurs quand elle avait rencontré sur son chemin le prince Hippothadée ?…