Aller au contenu

Page:Leroux - Le mystère de la chambre jaune, 1932, Partie 2.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
51
UN GESTE DE Mlle STANGERSON

d’observation, était garnie de carreaux non dépolis. Il faisait clair dans la galerie où toutes les lampes étaient allumées ; il faisait noir dans le cabinet. C’était là un poste de choix pour un espion.

Car que faisais-je, là, sinon un métier d’espion ? de bas policier ? J’y répugnais certainement ; et, outre mes instincts naturels, n’y avait-il pas la dignité de ma profession qui s’opposait à un pareil avatar ? En vérité, si mon bâtonnier me voyait ! si l’on apprenait ma conduite, au Palais, que dirait le Conseil de l’Ordre ? Rouletabille, lui, ne soupçonnait même pas qu’il pouvait me venir à l’idée de lui refuser le service qu’il me demandait, et, de fait, je ne le lui refusai point : d’abord parce que j’eusse craint de passer à ses yeux pour un lâche ; ensuite parce que je réfléchis que je pouvais toujours prétendre qu’il m’était loisible de chercher partout la vérité en amateur ; enfin, parce qu’il était trop tard pour me tirer de là. Que n’avais-je eu ces scrupules plus tôt ? Pourquoi ne les avais-je pas eus ? Parce que ma curiosité était plus forte que tout. Encore, je pouvais dire que j’allais contribuer à sauver la vie d’une femme ; et il n’est point de règlements professionnels qui puissent interdire un aussi généreux dessein.

Nous revînmes à travers la galerie. Comme nous arrivions en face de l’appartement de Mlle Stangerson, la porte du salon s’ouvrit, poussée par le maître d’hôtel qui faisait le service du dîner (M. Stangerson dînait avec sa fille dans le salon du