Page:Leroux - Mister Flow.djvu/142

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dorés, Helena m’étourdissait de caresses. Sa bouche me brûlait, j’aurais bien passé la nuit là, mais il fallut partir. Nous revînmes, toujours suivi par Fathi, aux salles de baccara. On y étouffait. Mais Helena devait sentir que tout cet or, remué autour de moi, achevait ma préparation. Elle me maintint là, devant les tables, impuissant. Je finis par demander grâce… Elle me dit :

— Non ! pas encore ! Je travaille pour vous, Rudy !… J’ai su par Mary quels étaient les habitants de notre couloir, au Palace. Ils ne sont pas encore rentrés à l’hôtel. En voici trois. Et elle me les désigna. Quand ils auront quitté la partie, nous serons tranquilles, tu ne feras pas de mauvaise rencontre.

Dans le moment, elle échangea un long regard avec une vilaine figure que je connaissais bien. C’était le traitant en bijoux qui, le premier soir, au « Privé », bavardait en me crachant dans le cou. J’avais eu des tuyaux, depuis, sur le personnage. Il s’appelait Abraham Moritz ; la saison précédente il avait eu une sotte histoire au « Normandy ». Après avoir, comme de coutume, dans la nuit, suivi la partie au Casino, il se promenait, dès huit heures du matin, dans les couloirs du « Normandy » devant la porte de ces dames pour lesquelles le Sort avait été particulièrement cruel et qui étaient en possession de bijoux d’importance. À la première apparition d’une femme de chambre, il faisait savoir « que Monsieur Abraham était là et qu’il sollicitait l’honneur d’être reçu ». Il l’était ou il ne l’était pas. Il ne se lassait jamais. Ce