Page:Leroux - Mister Flow.djvu/207

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

noyer. Les habite déchirés, ruisselant de l’eau du port, j’avais tout fait pour sauver ma peau. Que n’eus-je fait encore ? Je n’ose y penser.

Heureusement, la porte reste fermée. La femme de chambre devait suivre, sur le pont, les péripéties de ma poursuite qui continuait. Et, naturellement, les invités qui y avaient assisté étaient trop préoccupés de ce qui se passait dehors pour imaginer que l’homme que toute une ville cherchait aurait pu s’asseoir à leur table. On commençait à dîner, à côté, et il n’était question que de Mister Flow. J’entendais tout à travers la cloison. J’avais une faim et une soif terribles. Le bruit des couverts, des bouteilles que l’on débouchait, tout ajoutait à mon supplice. Mais si je souffrais physiquement, les deux voix féminines que j’entendais étaient un délice pour mon amour-propre, et j’en étais, si j’ose dire, moralement réconforté. Quant aux hommes, c’étaient tous des mufles qui espéraient bien que je m’étais noyé. Il y avait surtout un nommé Sam (sans doute le propriétaire du yacht, car il donnait souvent des ordres au stewart), qui se distinguait par sa goujaterie. Il osait interrompre ces dames dans leur dithyrambe, pour émettre des opinions d’une platitude cruelle. Il déclarait qu’un cambrioleur comme Mister Flow aurait dû être plus sévèrement traité qu’un assassin. « Ceux-ci sont moins dangereux ! prétendait-il, car tout de même, ils vous font peur ! Mais les autres, vous les encouragez. Ils vous font rire, ils vous amusent, ils vous enchantent, et les journaux le savent si bien qu’ils n’ont garde de heurter des sentiments aussi hideux. Vos