Page:Leroux - Mister Flow.djvu/274

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comprenez, Rudy, combien tout cela est absurde, mais de vivre nuit et jour au milieu de ces fables, cela impressionne, en vérité ! Ces gens me rendent malade. Ils ne vivent qu’avec les morts.

Pour chasser la bandshie, je ne trouvais rien de mieux que de déposer un baiser bien vivant sur la chair glacée de lady Helena, au-dessus du gant. Elle me dit encore : « Oh ! heureusement ! heureusement ! Rudy, que vous êtes venu !… Vous êtes ma seule consolation ici-bas, je vous assure !

Et puis, elle me retira sa main, car nous arrivions aux Black Rooks. C’était moins un château qu’une forteresse à laquelle nulle architecture moderne, du moins dans son cadre extérieur, n’avait ôté de sa rudesse et de sa farouche hostilité. Sombre demeure pavée de froides dalles, enfumée plutôt que chauffée par des cheminées colossales. Étroites fenêtres datant d’une époque où l’on enlevait les châssis en l’absence du seigneur, tant les carreaux de verre étaient alors un luxe rare et coûteux. Alors, le vent et les fantômes étaient les seuls maîtres de ces « salles maudites ». Les fossés taillés dans le granit étaient pleins d’une eau maussade. Au-dessus des murs, dominant tout le pays d’alentour, une énorme tour formant donjon dressait encore sa lourde silhouette menaçante…

Je ne pus retenir un soupir : « Oh ! Helena !… » et je lui serrai la main dans un geste de poignante commisération…

— Vous comprenez, n’est-ce pas ?…

— Oh ! oui, Helena !… pauvre, pauvre Helena !

Le son d’un cor s’était fait entendre, et la porte