Page:Leroux - Mister Flow.djvu/38

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enfouit dans sa poche, fit un paquet du reste qu’il ficela solidement et qu’il cacheta d’un sceau bizarre large comme un ancien décime qu’il dissimulait dans le creux de sa main. Un bout de cire, deux allumettes ; le tout fut fait avec une décision, une rapidité surprenantes, après un coup d’œil jeté au judas de la porte, où l’on ne vient jamais du reste, tant que l’avocat n’appelle pas.

Pendant qu’il procédait à cette ultime opération, je le regardai. Il me semblait que je le voyais pour la première fois. Il ne jouait plus la comédie. Il ne « composait » plus. Le véritable Mister Flow apparaissait soudain à mon regard effaré. Où était-il le niais Durin ? Son front semblait s’être élargi, ses yeux brûlaient d’intelligence. Un sourire redoutable plissait sa lèvre désabusée et sèche. Une dentition solide, féroce. Avec cela, un ovale du visage allongé, quasi aristocratique, une mâchoire inquiétante qui se terminait par un menton trop fin. Un nez spirituel aux narines fragiles. Rien de bestial. C’était pire. Cette figure tenait du drame et de la farce, appartenait à un pitre distingué ou à un assassin rigolo, et peut-être à un sadique.

Le secret de la vie de cet homme pouvait tenir, tout entier, dans la volupté de se savoir redouté, avec admiration, et de ne rien négliger pour ajouter à sa gloire, car enfin, depuis longtemps, il devait être riche, et, s’il ne l’était pas, quelle admirable confiance en lui-même, sûr qu’il était du trésor public !

Je le quittai, avec humilité, comme un pauvre