Page:Leroux - Mister Flow.djvu/61

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fut volé. Elle eut deux peignoirs apportés décemment par ces dames. Sur les planches, le gros Mr. Merril fumait sa pipe, jovial, racontant que sa femme voulait lui tatouer sur les poignets des versets de la Bible.

Pendant ce récit, j’imaginai que lady Helena regardait avec une singulière insistance l’ex-petite danseuse annamite qui était assise en face de moi et qui avait tourné vers l’amphitryonne sa petite tête précieuse et énigmatique. Mais on ne sait jamais avec Helena, cette magicienne. Elle est le centre rayonnant d’une volupté latente. Ses yeux immenses fixent n’importe quoi et n’importe qui avec la même inquiétante tranquillité dans le bonheur, dans le bonheur de tout.

J’ai à peine dit quelques mots, soudain passif dans sa présence, dans son parfum, dans l’air qu’elle expire et que je respire. Mon cœur et mon sang obéissent au rythme qui soulève, près de moi, ses deux seins cuivrés, qui font trembler d’impatience les paumes de mes mains recourbées comme des coupes avides. Et je sens soudain sur mon pied la pointe de son soulier d’argent. Est-ce un hasard ? Je veux savoir, je déplace mon pied, mais on insiste.

Je dois rougir sous mon rouge. J’éclate d’orgueil et Helena éclate de rire en me regardant. Se moque-t-elle de moi ? Après tout, c’est bien possible ! Non ! elle a reconquis son Lawrence et elle souligne sa victoire. Il semble que le jazz n’attendait que l’entrée des Dolly-Sisters pour que le battery-man devienne subitement fou. Un jazz