Page:Leroux - Rouletabille chez les bohémiens, paru dans Le Matin, 1922.djvu/24

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— Tu me demandes de qui je parle ? s’écria Jean, mais de l’assassin de M. de Lavardens et du ravisseur d’Odette… Ah ! Rouletabille, Rouletabille !… Tu sais qu’on a enlevé Odette et tu n’es pas déjà sur ses traces !…

— Qui te dit que je ne suis pas sur ses traces ! releva le reporter avec impatience… qui te dit que je ne cours pas après elle plus vite dans cette chambre que dans une auto qui brûlerait la route ! Malheureux ! ajouta-t-il en se rapprochant de lui, tu cours après Hubert !… Autant de pas qui t’éloignent d’Odette !…

— Tu défends Hubert ! râla Jean… Eh bien ! tiens ! lis !… voilà ce que j’ai trouvé chez Hubert, dans une pièce ravagée par le drame qui s’est déroulé cette nuit !… Lis ! mais lis donc !…

Rouletabille lisait une lettre brutalement froissée :

« Mademoiselle, l’accueil que j’ai reçu chez vous, au mépris de la parole donnée, l’attitude de votre père et la vôtre, hélas ! à mon égard, tout cela m’indigne ! Il faut que je vous voie, je vous attendrai ce soir même à dix heures dans le jardin, près de la porte mitoyenne. Si vous ne venez pas, je ne réponds plus de moi-même ! Votre désespéré Hubert de Lauriac. »

— Comprends-tu maintenant ? haletait Jean… Je te jure qu’il n’y a pas besoin de se mettre à quatre pattes pour comprendre. Odette reçoit une lettre, elle veut éviter un malheur. Elle se rend dans le jardin… Le misérable l’entraîne chez lui. La pauvre petite crie. Son père l’entend, décroche un fouet à chien que voici — et Jean mettait sous le nez du reporter le fouet à chien de M. de Lavardens qu’il venait également de ramasser chez Hubert — et il se précipite chez ce misérable !… Scène terrible… il veut ramener sa fille !… La scène se poursuit jusque dans le jardin, jusque dans le parc et il ne recule pas devant le crime pour pouvoir emporter Odette !…