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Page:Leroux - Rouletabille chez les bohémiens, paru dans Le Matin, 1922.djvu/93

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Mme de Meyrens, par-dessus ses vêtements avait endossé un cache-poussière et s’était coiffée d’une petite toque que Jean ne lui avait pas vue la veille. Telle quelle, elle paraissait prête à partir pour quelque voyage en auto découverte et Jean ne fut point surpris quand il l’aperçut pénétrant dans un garage où elle devait être attendue car le gardien se mit aussitôt à sa disposition.

Quelques minutes plus tard elle en ressortait, conduisant elle-même une petite torpédo qui s’engagea aussitôt à une allure assez prudente dans les rues étroites de la ville. Jean n’eut aucune peine à la suivre. Non seulement la voiture allait prudemment mais silencieusement, ne faisant entendre aucun bruit de trompe.

Elle se dirigeait vers le quartier de la prison.

Quand elle en fut à une centaine de mètres, elle s’arrêta au coin d’une rue. Jean vit alors Mme de Meyrens mettre au point mort, consulter une montre minuscule qu’elle portait au poignet, se lever et descendre de l’auto avec une nonchalance qui n’était point dénuée d’une certaine grâce.

Prévoyant qu’il allait se passer un événement important autour de la prison, Jean fit un détour et se dirigea par une ruelle adjacente vers l’établissement pénitentiaire.

En route, il rencontra M. Bartholasse qui se rendait au Palais de justice et il lui demanda d’aller prévenir immédiatement M. Crousillat que Mme de Meyrens se trouvait aux environs de la prison, avec une auto, dans un dessein des plus suspects. M. Bartholasse répondit avec un mauvais sourire au jeune homme que son chef était allé pêcher à la ligne dans les environs et que lui, simple greffier, ne se risquerait pour rien au monde à aller déranger un juge d’instruction dans cette grave occupation.

Alors Jean résolut d’aller trouver le directeur de la prison lui-même. On lui répondit au greffe que M. le directeur était allé pêcher à la ligne avec M. Crousillat, qu’ils étaient partis à la première heure et qu’ils ne devaient revenir que le soir. Ces conversations et ces démarches avaient pris du temps. Il était maintenant près de huit heures. En sortant de la prison, la première chose que vit Jean fut la silhouette de Mme de Meyrens qui disparaissait au coin de la rue où elle avait garé son auto. De là, elle devait surveiller la prison. Qu’attendait-elle ?

Jean en était là de ses réflexions quand il dut se jeter de côté pour éviter un charreton rempli de gravats qui sortait de la voûte, traîné à la bretelle par un ouvrier et poussé par un manœuvre… Aussitôt, à