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À TRAVERS LA CORSE

rent ? Qu’étions-nous allés faire à Calvi ? Promettre des digues ! C’est à croire que M. Lockroy a la maladie de la digue. Je lui avais déjà entendu promettre aux Brestois toutes les digues qu’ils voulaient. En Corse, c’est bien une autre affaire. On ne peut rencontrer un trou le long de la côte sans que le ministre, sur les instances des indigènes, promette de le fermer. Cela nous fera des ports de guerre innombrables. Nous aurons beaucoup plus de ports de guerre que de vaisseaux.

— Eh bien, on en construira ! conclut un Corse auquel j’avais soumis cette judicieuse réflexion.

À Bastia, on doit créer un poste de torpilleurs qui menacera la Spezia. Un habitant me fait entendre que le vieux port suffirait pour cela. Je lui conseillai, puisque le ministre était en train, de lui demander une digue.

Ajaccio a besoin aussi d’une digue. Quant à Porto-Vecchio, il peut être certain de son sort… il l’aura, sa digue ! Il n’y aura même que lui qui l’aura, car j’ai appris, dans la soirée que, si le ministre promettait partout des digues, il n’en voulait construire que là.

Bastia, où nous débarquons le soir même, est une ville supportable pendant deux heures, avec ses grandes bâtisses blanches et carrées, sans style, sans art, sans beauté. Sur la grande place, qui regarde l’île d’Elbe, dont on aperçoit les monts, on a érigé un Napoléon nu comme un ver ou comme un gladiateur romain. Il a l’air